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2020-01-11 - vision pebip. : sweet chariot (2)
En relisant l’article précédent (dont le contenu n’a rien à voir avec Ben-Hur, rapport au chariot), on se questionne :
“Swing Low, Sweet Chariot” a été composée avant 1862 par Wallace Willis, ancien esclave indien choctaw affranchi et vivant dans les anciens territoires indiens. Il s’est inspiré de la rivière Rouge (Mississippi), qui lui rappelait le Jourdain, et du prophète Élie qui aurait rejoint le paradis dans un chariot.
Il est possible ou probable que l’on se soit trompé ou que les informations récoltées soient erronées (dues à des mauvaises traductions ?) ??
On s’arrête sur : “un ancien esclave choctaw affranchi”.
On ne comprend pas : existaient-ils des esclaves indiens ? ou alors comment des esclaves, hommes et femmes afro-américain.e.s, sont-ils devenu.e.s indien.ne.s ?
On se souvient de certains épisodes de la série Treme de David Simon et d’Eric Overmyer, qui se déroule à New-Orleans, dans lesquels apparaissent les “chiefs” indiens blacks et leurs parades urbaines de Mardi Gras :
- https://youtu.be/eu4gZs9C1i0
- https://youtu.be/dmgXIMbT3cU
- https://youtu.be/F0Q27a8EJO4
- https://youtu.be/Hi46POoxHP0
- https://youtu.be/2FT9z-4lJ2I (Young Maasi Hunters, vidéo de février 2019)
- https://fr.wikipedia.org/wiki/Indiens_de_Mardi_gras (voir les images plus bas)
Alors on se met à corriger et à compléter :
Swing Low, Sweet Chariot a été composée avant 1862 par Wallace (or Wallis) Willis et sa femme Aunt Willis, anciens esclaves affranchi.e.s et vivant.e.s dans les anciens territoires indiens choctaw.
Et en partant de ce spiritual et en creusant dans plusieurs informations, on découvre une étrange histoire.
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Qu’est-ce que la nation Choctaw ? et pourquoi dit-on que Wallace Willis était un ancien esclave “indien choctaw” affranchi ?
La nation Choctaw est une nation indienne de la basse vallée du Mississippi (Chateaubriand les appelle “Chactas” dans Atala et Les Natchez). Au XIXe siècle, les Choctaws formaient une des « Cinq tribus civilisées », ainsi dénommées car elles avaient intégré un certain nombre de pratiques culturelles et technologiques des Européens (La politique indienne de George Washington visait à « civiliser » les Indiens, il estimait que les Indiens étaient égaux mais que leur société était inférieure).
Les Choctaws sont célèbres pour la grande générosité qu’ils ont manifestée en fournissant des vivres pendant la famine irlandaise - la Grande Famine est le nom donné à une famine majeure en Irlande entre 1845 et 1852. Juste 16 ans auparavant, le peuple Choctaw avait éprouvé « la Piste des larmes » (épisode d’exode forcé de changement de terres et de territoire) et avait lui-même fait face à la famine.
Les Choctaws vivaient dans de petits villages. Leurs habitations étaient des huttes légères recouvertes de branchages et de feuilles. Dans de petits champs familiaux, hommes et femmes cultivaient le maïs, la courge, la patate douce, le tournesol, le melon et le tabac. Le riche sol alluvial de la basse vallée du Mississippi assurait aux Choctaws de splendides récoltes.
Au début du XIXème siècle, les Choctaws commencent à s’adapter à la civilisation des Blancs. Ils deviennent chrétiens, ils ont des fermes et des plantations. Mais leur prospérité attire la jalousie de leur voisins blancs. En 1830, le président Andrew Jackson ordonne leur déportation vers le Territoire Indien situé à deux mille kilomètres vers l’ouest, dans les actuels états de l’Oklahoma et du Kansas : c’est l’épisode de « la Piste des larmes ».
Les affranchi.e.s Choctaw étaient des Afro-Américain.e.s réduit.e.s en esclavage qui ont été émancipé.e.s après la guerre civile américaine et ont obtenu la citoyenneté de la nation Choctaw. Les affranchi.e.s Choctaw ont été officiellement adopté.e.s comme membres à part entière de la nation Choctaw en 1885. Comme d’autres tribus amérindiennes, les Choctaw détenaient habituellement des esclaves comme captif.ve.s de guerre (la guerre civile américaine, the American Civil War). En adoptant des éléments de la culture européenne, tels que de plus grandes fermes et plantations, ils ont commencé à adapter leur système à celui de l’esclavagisme en achetant et en détenant des travailleur.e.s esclaves de descendance afro-américaine. L’esclavagisme a duré dans la nation Choctaw jusqu’en 1866. Les anciens esclaves de la nation Choctaw s’appelaient donc les affranchi.e.s Choctaw, et puis, plus tard, un certain nombre d’entre eux-et-elles avaient autant des origines Choctaw que des ascendances africaines et parfois européennes.
Comme quoi, à l’encontre de notre connaissance survolante de l’histoire et des histoires, comme aussi des grandes fresques nazairiennes, que l’on trouve dans certaines rues et certaines façades, et qu’on peut estimer essentialistes (en considérant des différences et des catégorisations établies comme différences de « nature », et par essence, entre les humains), images d’Epinal et feedbacks d’exotisme, les histoires et les réalités, comme les vécus, sont beaucoup plus complexes qu’on ne le pense…
nota : Pendant la Première Guerre mondiale, l’armée américaine utilise des Chactas (Choctaws) pour ses communications cryptées, ils étaient plus rapides que les machines à coder. La méthode est reprise pendant la Seconde Guerre mondiale, un groupe de Chactas (Choctaws) enrôlé dans l’armée utilisait leur langage comme un code. Ils servaient d’éclaireurs pour des Indiens de diverses nations, plus particulièrement des Indiens Navajos, qui étaient opérateurs radio ou chiffreurs de messages codés. Cela a fait gagner de nombreuses batailles. De cette histoire est née le film de John Woo Windtalkers : Les Messagers du Vent avec Nicolas Cage (2001).
L’histoire de Wallace Uncle Willis et d’Aunt Minerva
Wallace « Uncle » Willis et sa femme, « Aunt » Minerva, étaient les esclaves de Britt Willis, un riche fermier mi-irlandais, mi-choctaw. Lorsque les Choctaws ont été re-localisés par le gouvernement des États-Unis à la suite du Traité du Dancing Rabbit, Britt Willis a parcouru « la Piste des larmes » avec sa femme Choctaw sur le territoire indien de l’Oklahoma. Parmi les 300 esclaves qui ont fait le voyage avec Britt se trouvaient Wallace et Minerva.
Le groupe s’est installé près de Doaksville, en Oklahoma, qui est situé près de l’actuel Hugo et de Fort Towson. C’est ici que Wallace a composé des « chansons de plantation » (Plantation Songs) tout en travaillant les champs de coton de Britt Willis. La petite-fille de Britt, Jimmie Kirby, se rappelle : « Maman m’a dit que c’était par une chaude journée d’août 1840. Ils bêchaient les longues rangées de coton dans le riche champ des basses terres. Nul doute que Wallace était très fatigué. Ils travaillaient dans les champs du lever au coucher du soleil. Et le coucher du soleil était loin. Au sud du champ, il pouvait voir la Rivière Rouge (Red River) scintiller au soleil. »
Ils se sont inspirés de la rivière Rouge (Mississippi), qui leur rappelait le Jourdain, et du prophète Élie (Ezekiel) qui aurait rejoint le paradis dans un chariot.
On trouve certaines références faisant mention que certains esclaves changeaient les paroles en « Swing Low, Sweet Harriet » en référence à Harriet Tubman, qui était un des responsables du chemin de fer clandestin qui transportaient les esclaves vers le nord et vers la liberté. Pendant son séjour à Doaksville, Britt Willis a souvent embauché Wallace Willis et Aunt Minerva à la Spencer Academy, une école de garçons Choctaw située à proximité. Le couple est rapidement devenu célèbre parmi les étudiants en raison de leurs Plantation Songs. Wallace et Minerva chantaient des spirituals, qui comprenaient des chants fameux tels que « Swing Low, Sweet Chariot », « Roll, Jordan, Roll », « Steal Away to Jesus », « I’m a Rollin', I’m a Rollin’ » and « The Angels Are A’ Comin' ».
liens :
(un grand merci à Doug Goodkin qui sur son site s’est posé la même question que nous et a ainsi permis l’accès à des informations précises)
références :
http://douggoodkin.blogspot.com/2017/10/choctaw-chariot.html
https://www.okhistory.org/publications/enc/entry.php?entry=WI018
les black indians à la Nouvelle-Orléans.
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